Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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FEW III focus
FEU, subst. masc.
[FEW III, 651b : focus]
 

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C'est folie de mettre le feu à sa maison pour brûler celle de son voisin : ...ilz sont aucuns qui dient qu'ilz servent leurs dames quant ilz font beaucoup de choses, soit en armes ou en autres fais. Mais je dy que ilz servent eulx mesmes quant l'onneur et le preu leur en demeure et non mie a la dame ! Encore, ma dame, se vous ou autre vous voulez excuser en disant : " Je ay diverse partie qui pou de loyauté et de plaisir me fait ; pour ce puis, sans mesprendre, avoir plaisir en aucun autre pour oublier merencolie et passer le temps" - mais certes, telle excusacion, sauve vostre bonne reverence et de toutes autres qui ce dient, ne vault riens, car trop fait grant folie cil qui met le feu en sa maison pour ardoir celle de son voisin. (CHR. PIZ., Duc vrais amans F., a.1405, 176).

 

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D'une petite étincelle naît grand feu V. étincelle

 

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Joie s'en va comme feu de feurre V. joie

 

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Il ne faut pas adjoindre le feu et l'eau ensemble : [Une jeune fille est sollicitée pour épouser le vieux roi de Sicambre.Elle dit...] ... Et trop plus de deport, de joyes et de soulas ay je intencion de avoir en mon jeune mary, qui sera riche d'honneur et de haultes proesses et chevaleries, que avecq le roy de Sicambre et sa richesse ! Et aussi il est trop ancien et n'est point chose faisable de adjoindre le feu et l'eaue enssamble. (Percef. V, R., c.1450 [c.1340], 178).

 

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[Contexte grivois] Il n'est feu que de jeune bois (seul le jeune bois vaut dans l'amour) V. bois

 

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Il n'est si grand feu qu'on ne puisse éteindre : De hacquebuttes et de rudes froars De toutes pars froissiés nos bastillons (...) :Il n'est si grand feu qu'on n'estaingne. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 61).

 

Rem. DI STEF. 343c, feu.

 

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Feu, le feu engendre : D'Ève sa femme il ne put se deffendre. D'où vient cela ? D'amour qui prend dedans son coeur naissance. Nous doncq conçus en carnelle plaisance, Que ferons nous ? car feu, le feu engendre. Quoyque raison nous en veulle reprendre, Force nous est dancer en ceste dance : D'où vient cela ? (CHASTELL., Oeuvres K., t.8, c.1435-1475, 310).

 

Rem. DI STEF. 344c, feu.

 

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Il ne faut pas mettre l'étoupe près du feu V. étoupe

 

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Le tison brûlé, si on le jette au feu, prend plus rapidement V. tison

 

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On a de verte laigne ("bois") feu et tisons V. laigne

 

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Pas de feu sans fumée (mais fumée est souvent sans feu) : Et quant a dire, "Ce ne sera mie mal, puis que fait de pechié n'y sera", helas, ma dame ! ne soit nul ne nulle si asseuree de soy qu'elle se rendecertaine, quelque bon propos que elle ait, de garder tousjours mesure en sifaicte amour et qu'il ne soit sceu. Comme j'ay ci devant dit : certes, c'est chose impossible, car feu n'est point sanz fumee, mais fumee est souvent sans feu. (CHR. PIZ., Duc vrais amans F., a.1405, 176). Et quant a dire ce ne sera mie mal puisque le fait de pechié n'y sera, helas ! Madame, ne soit nul ne nulle nul[le] si asseure de soy qu'elle se rende certaine de soy, quelque bon propos qu'elle ait de garder tousjours mesure en si faicte amour. Et qu'il ne soit sceu, comme j'ay devant dit, certes c'est chose impossible : car feu n'est point sans fumee, mais fumee est souvent sans feu. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 115). Onquez feu ne fut sans fumee, Ne doloreus cueur sans pensee, Ne reconfort sans esperance, Ne joyeus regart sans plaisance, Ne beau soleil qu'aprez nuee. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 309). Et cy commenceray la fin de ce compte, priant, requerant et suppliant a toutes dames et damoiselles, bourgoises et autres, de quelque estat que soient, que toutes prenent exemple a ceste si tres noble dame oiseuse qui par druerie se perdist, et veullent bien penser au dit commun qui dist: Onques ne fut feu sans fumee, tant fust il en terre parfont. (LA SALE, J.S., 1456, 307).

 

Rem. Morawski 745 : Feu ne fut oncques sans fumee, 1405 : Nul feu est sens fumee ne fumee sens feu ; Hassell 113, F69 ; DI STEF. 343b, feu.

 

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Parler boute feu en maisons. "La parole peut semer la zizanie dans les familles" : Parler boute feu en maisons Et destruit paix, ce riche avoir : On aprent a taire et a veoir, Selon les temps et les saisons, Sauves toutes bonnes raisons. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 376).

 

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Petits charbons allument les grands feux V. charbon

 

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Plus il y a de bois, plus le feu se développe V. bois

 

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Plus il y a de feu, plus vite bout le pot : Que vault aler de deux en trois Et le hoc en l'eaue tenir ? Monstrés aucune cause entrois Que vous avés temps et loisir, Car nostre maistre a grant desir D'en avoir la fin et le bout : Plus y a feu, plus tost pot bout. (TAILLEV., Prise Luxemb. D., 1443, 169).

 

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Plus on est près du feu, mieux on se chauffe : Car main et tart Son dolent cuer de sa dame ne part, Eins la compaingne en tous lieus sans depart ; Et cils qui est plus près dou feu, plus s'art. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 122). J'entens ensi selonc la teneur de vostres lettres que vous estes atains et enamourés de vostre dame par le sougneusement et volentiers regarder. Je le croi bien, car com plus est on priés dou feu, mieuls se caufe on. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 61).

 

Rem. Morawski 2088 : Qui plus est prés du feu de plus prés s'en chaufe ; Hassell 113, F72.

 

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Qui a métier du feu finit par le chercher / au doigt le doit tâter V. métier

 

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Qui est à saudées, il doit crémir le feu V. soldée

 

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Qui est plus près du feu plus (tôt) s'art V. ardre

 

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Qui ne veut se brûler, qu'il s'écarte du feu V. brûler

 

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Retrais le feu et tu éteindras la fumée : L'en dist ensi communement, "Retrai le fieu bien sagement Et la fumée exteinderas" (GOWER, Miroir homme M., c.1376-1379, 209).

 

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Tard vient au feu qui souffle quand il est éteint : Pourquoy ne ving, las, quant tamps fu ? Pourquoy ne ving ? Tart vient au fu Qui souffle quant il est estains. (Pastor. B., c.1422-1425, 84).

 

Rem. DI STEF. 344a, feu. Cf. aussi Morawski 564 : De torte buche fait len droit feu, 675 : En petite cheminee faict on bien grant feu et en grande petit feu, 744 : Feux en estoupes ne se puent celer, 746 : Feu ne sera ja bien couvert la ou il y a autruy sergent, 1754 : Quant plus a de buche el feu, et plus art, 2083 : Qi plus covre le fu e plus ard, 2382 : Torte buche fet droit feu, 2469 : Verte buche fait chault feu.
 

Lexique de proverbes Pierre Cromer


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